Mercuriale des jardins : garçon ou fille ?

Mercurialis annua L.

 

 

 

La Mercuriale des jardins est une « mauvaise herbe » de nos potagers bien connue. Elle colonise rapidement les terres nouvellement rapportées où elle trouve tout l'azote indispensable à son développement. Aussi appelée Foirolle, Caquelit, Chimou, Rimberge, Aremberge, Vignette, Chou de chien, Roberte, Ortie bâtarde, et par bien d'autres noms populaires encore, elle répand une odeur fétide quand on l'arrache. C'est pourquoi Olivier de Serre, un célèbre agronome du XVIème siècle, affirmait que, lorsque la plante abondait dans les vignes, elle pouvait communiquer une senteur désagréable au vin. Malgré cela, elle fut autrefois cultivée comme un légume, probablement à cause de sa saveur salée due à la présence de sels de potassium. Ce n'est que par la suite qu'elle s´est échappée des cultures et est devenue envahissante et nuisible. Le goût amer de la plante, du fait d´un hétéroside flavonique, est peu adapté à nos habitudes gustatives et rend inimaginable de nos jours son usage comme un légume.

De manière plus précise, la Mercuriale des jardins est une plante annuelle, à tige verte, ramifiée et feuillée dès la base. Elle se caractérise par des nouds bien marqués. Les feuilles sont opposées, ovales à lancéolées, crénelées sur les bords et à courts pétioles. Les fleurs sont verdâtres. Les fleurs mâles, identifiables par la présence de 10 étamines, se regroupent en glomérules formant un épi pédonculé au sommet des plantes. La Mercuriale des jardins est pourvue d´un mécanisme de projection des fleurs remarquable : à l´ouverture des anthères, certaines cellules s´emplissent d´eau jusqu´à l´éclatement. L´énergie est telle que de nombreuses fleurs mâles sont projetées hors de l´inflorescence à plus de 20 cm. Ce phénomène se produit le plus souvent le matin. Une partie des fleurs mâles reste sur la plante. Les autres se trouvent en contact avec les fleurs femelles d'autres pieds situés à proximité. Le produit de la fécondation donne des fruits qui correspondent à deux coques hérissées de poils crochus contenant deux graines. A la maturité, les graines sont dispersées par les fourmis ou . les chaussettes du jardinier! Cette propriété de dissémination expliquerait peut-être l'étymologie romaine du nom scientifique, Mercurialis annua L., qui tire son nom du dieu Mercure, dieu du Commerce et des voyageurs.

Toujours dans l'antiquité, Hippocrate, éminent médecin grec, utilisait la Mercuriale des jardins pour ses propriétés laxatives, diurétique et purgative. Pour cela, il utilisait le suc de la plante entière, mélangé à du miel, pour fabriquer le miel de Mercuriale. On lui prêtait faussement des vertus gynécologiques. Dioscoride (v. 40-90 apr. J.-C.), médecin et botaniste grec, avait effectivement constaté que la plante était dioïque, c´est-à-dire que les organes reproducteurs mâles et femelles étaient répartis sur des pieds différents. Il affirmait que la plante mâle, en décoction, favorisait la procréation des garçons, et la femelle celle des filles. Mais, il confondait les deux et il oubliait de dire lequel des conjoints devait boire la tisane ! Ces médications dignes d'un apprenti sorcier s'avèrent être très risquées : appartenant à la famille des Euphorbiacées, dont de nombreux représentants sont toxiques par leurs propriétés purgatives, la plante doit être utilisée avec modération et prudence du fait de la présence de saponines, de méthylamine et triméthylamine. peu bénéfiques à la santé humaine !