Le Grand Plantain …c’est le pied !

Plantago major L.

 

 

 

Comment reconnaître l’herbe à 5 côtes ? Pour le savoir, demandez la réponse à ce prince charmant qui souhaitait épouser la jeune fille de son pays qui exécuterait la couture la plus parfaite ? Une villageoise tenta sa chance avec l’aide d’un lutin qui lui remit une aiguille magique. Elle prit une herbe en chemin et à l'aide de son aiguille, elle produisit une couture à 5 côtes parfaites, et épousa le prince.
Autre astuce : on étire délicatement le pétiole, jusqu’à déchirer la feuille en travers et on voit apparaître des fils qui correspondent aux côtes ou nervures de la feuille. Ces fils étaient utilisés par les enfants en Europe pour fabriquer des cordes d'instruments de musique, d'où le surnom de  la plante en Angleterre : le « banjo » ou la « Beatles'Guitar » (guitare des Beatles), puis…
…chantez un jour de temps sec de fin du printemps, les fins filets des étamines du Plantain majeur (Plantago major L.) s’exposeront au vent. Point de nectar dans ses fleurs, c’est inutile car le vent sera le transporteur du hasard de l’amour. Aussi, beaucoup de grains de pollen sont produits, avec quelques allergies pour certaines personnes face à ce dévergondage. Voici, une autre tactique élaborée par l’Amourette pour favoriser la fécondation croisée et les échanges génétiques entre les individus : la floraison se fait de bas en haut de l’épi avec des fleurs ayant d’abord un pistil réceptif à tout pollen,  puis une fois la chose faite, le pistil n'est plus réceptif et c’est au tour des étamines de produire le pollen transporté à tous vents.
Une fois fécondés, les fruits donneront de nombreuses graines foncées, d’où la symbolique de fertilité dans la Chine ancienne.  Ce symbole n’est pas arrivé jusque dans nos contrées, puisque la légende raconte, il y a fort longtemps, qu’une châtelaine, belle et mince, et sa gouvernante, petite et ronde, recherchaient éperdument un prince à épouser. À la porte de son château, elles épiaient le passage de tous les prétendants, mais d’aucun ne leur plaisait. Un jour, un prince dont elle tomba folle amoureuse lui promit de revenir le lendemain matin pour lui demander sa main. Les jouvencelles attendirent toute la nuit et tous les jours suivants sans que le prince ne revienne.  On raconte depuis, qu'à force de patienter, elles s'enracinèrent dans le sol. La gouvernante, plus ronde, se transforma en Bonne femme, la châtelaine, éprise de chagrin, se changea en Plantain lancéolé (une espèce voisine toute maigre).

Tout le monde le sait, les graines n’ont pas de pattes, mais peu le savent, elles contournent le problème avec un tégument qui par temps humide se collera à tout ce qu'elles  touchent pour se disséminer vers de nouveaux espaces vierges, comme les sols argileux tassés et pauvres en oxygène des bords de chemins ou des pâturages. Les feuilles de Plantain rond sont disposées en rosette aplatie au sol et  supportent bien le piétinement qui en font une espèce pionnière et cosmopolite dans toutes les régions tempérées du globe : Europe, Asie, Amériques.
Il n’y a qu’un pas pour en faire la protectrice des voyageurs. En Franche-Comté, elle fait partie des « herbes d'égarement », celui qui marche dessus perd son chemin. Comme Christophe Colomb, qui découvrit l’Amérique au lieu de l’Inde, le Serpentin est une espèce pionnière égarée, et si bien que les amérindiens  parlaient de « White man's footprint : empreinte de l'homme blanc », car le Plantaigne prospérait autour des colonies européennes. Cette croyance était telle qu’au XVIIIe siècle, en Angleterre, on attachait quelques Chapeaux noirs à l'intérieur des diligences comme talisman pour le voyage. La prochaine fois que vous prendrez le Shuttle, n’oubliez pas votre bouquet de Plinton…cela fera le plus bel effet de la mode française! Ce n’est pas gentil de se moquer des « Grands Bretons », mais il y a un remède à cela, au XVIe siècle, on croyait en Bretagne que celui qui mettait sous sa semelle gauche du Plantain mâle et trois grains de sel devenait invisible : une bonne manière de passer inaperçu !
Sachez, que le plantain présente une action cicatrisante et anti-inflammatoire connue depuis longue date, et une feuille de Plantousse pliée en deux vous épargnera bien des souffrances d’une ampoule au pied. Ce n’est pas pour rien que Plantago signifie chez les romains « plante qui agit ». Mais, c’est le pouvoir antihistaminique de l’Herbe aux piqûres qui est le mieux connu : frotter  une feuille de plantain sur une piqûre d’ortie et la douleur s’en ira. La composition basique et l’aucuboside du suc de l’Herbe au cent coutures neutralise l’acidité de l’acide formique contenu dans les poils urticant de l’ortie  tout en inhibant la dégranulation des mastocytes ; en clair, il ralentit la réaction allergique et la formation des boutons qui grattent, et l’effet placebo fait parfois des miracles chez les enfants!

Pour nos amies les vaches, le Grénasse dans les pâtures est réputé pour diminuer l'effet météorisant dû aux légumineuses, et les long épis de graines du Pain d’oiseau font le délice des oiseaux en cage car si elles sont ingérées avec suffisamment de liquide, les graines gonflent sans être digérées, ce qui entraîne une défécation plus douce et plus volumineuse. Tout un poème … Les jeunes épis des Queues de rat, quand ils sont encore verts et tendres, peuvent être ajoutés crus aux salades : ils ont un goût qui rappelle la noisette, un goût qui n’a rien à voir avec la banane plantain. Enfin, vous pouvez manger les jeunes feuilles cuites et panées, ça a un goût de champignons et ça, c’est le pied du voyageur !